F a a z e l l a
Faazella est née en 1756. Mozart aussi. Elle aura trente trois ans le jour de la Révolution. Très tôt, elle a conscience de son époque. Très tôt, elle veut se marier au présent.
« -Ton amour vient du ciel : Dieu nous chérit, il s’aime.
Nous nous aimons dans nous, dans nos biens, dans nos fils,
Dans nos concitoyens, surtout dans nos amis :
Cet amour nécessaire est l’âme de notre âme ;
Notre esprit est porté sur des ailes de flamme. »
Faazella a été l’amante de Voltaire le temps d’un poème, lu dans le
« Philosophe ignorant. Elle côtoie, par les livres, et le conteur et le poète.
Elle a des affinités aussi avec Louise Labé,
la poétesse lyonnaise de deux siècles passés.
Faazella fait des recherches dans son domaine de prédilection, la musique. Elle aime composer. Par un hasard de librairie, elle a rencontré l’ordonnateur de l’Encyclopédie, l’éditeur Le Breton. Celui-ci a vite compris que le moyen d’expression préféré de Faazella, plus familier que d’autres, la musique, est une façon pour elle de porter son humanité. Il la voit intéressée par toutes les formes de la pensée, par toutes les créations du travail. Quand il lui propose de participer comme «ouvrière de recherche», c’est son expression, aux travaux de sa maison d’édition elle est enchantée. Avec lui, elle pense qu’aider à « exposer les savoirs et les savoir- faire aux hommes avec qui nous vivons et les transmettre à ceux qui viendront » est sa mission. Passionnée par les découvertes et les évolutions de son époque, elle a apporté son obole à la seconde édition de l’œuvre, orchestrée par Diderot et d’Alembert.
Faazella est l’enfant de deux mondes. Elle est née « sujet du Royaume » depuis que la principauté d'Orange a été rattachée. Sa mère en était la dernière héritière. L’univers qui l’a vue naître va se transformer avant de disparaître sous les pas de ceux qui traverseront le Pont Neuf en quatre vingt neuf. Tout bougera même la matière par l’action des esprits les plus avancés.
La Principauté d’Orange, avant d’être effacée, avait contribué, à sa façon, à la naissance d’un être nouveau, Faazella, fruit désiré par tous ceux qui la rencontraient. Elle se demande sempiternellement à quoi sert l’apprentissage des Lettres s’il n’aide pas à déchiffrer le sens du présent. Elle aime muter en notes les moments qui éblouissent sa vie. Avant de les accueillir, une ritournelle s’impose à elle : comment la portée pourra-t-elle supporter tant d’intimité ? Quand elle a appris que le chanteur d’opéra Nobaru Mezgo était son père, elle a voulu tout effacer tellement elle l’a adulé.