Goulotte « Chéré »

 

 

, le grimpeur avait besoin des pieds et des mains

pour se fixer à la paroi… de glace.

Des outils en acier, fabriqués par son ami Jacky, forgeron de métier,

chef d’atelier à l’usine de Chamonix, l’aidaient à tenir… dans l’espace.

Ces objets du plaisir pointaient leur nez au bout de ses pieds,

histoire de les planter…dans la masse.

Il saisissait d’une main acérée le manche d’acier, 

terminé par une pointe aiguisée

qu’il lançait avec fermeté dans la matière… avec grâce.

Il essayait de sculpter dans l’espace le point de déséquilibre

sans jamais y arriver, une façon de l’éviter.

Par deux points fixes, passait sa ligne de vie.

La géométrie de l’espace a des lois que la montagne ne connaît pas ;

elle le prenait dans ses bras

en pensant qu’il allait la pénétrer, une façon de l’égarer.

Il était en émoi quand il s’évertuait à l’escalader.

Les points d’équilibre se suivent et ne se ressemblent pas.

Invisibles, l’auteur de la montée doit les repérer dans le couloir gelé.

Quel bonheur de s’élever à la verticale en se mariant à la loi de la gravité !

Que les liens tenus avec la glace se défassent

et le bonheur devient cercueil.

Cela lui serre le cœur de regarder en bas. Le beau impose son choix.

Il faut monter toujours plus haut pour sortir

au sommet de ce couloir… de glace.

Encore quelques longueurs de cordes et le grimpeur côtoiera le bonheur...

et sa limite, dessinée là où la chaleur du soleil transforme la matière.

Et si son désir de lumière faisait de cette face de glace…son linceul.

L’auteur, si seul, avait besoin de toutes ses mains pour fixer ce passage ;

il avait besoin de tous ses pieds pour continuer son chemin.