heureux.
Je n’ai jamais réussi à te le dire auparavant ; maintenant, il faut tu saches.
Je suis un homme heureux.
Heureux de m’être marié à notre destinée voilà trente années.
Heureux d’avoir vécu ce que j’ai vécu, même si je n’ai pas su le vivre avec toi vraiment,
vingt ans durant. Heureux que nos trois enfants si beaux, si intelligents, nous aient choisis comme parents. Heureux même si je n’ai su faire ce que j’aurais dû faire, même si je n’ai pas su dire ce que j’aurais dû te dire. Heureux même si mon histoire a si souvent heurté la tienne, même si je t’ai oubliée quand je me suis oublié en vivant mes passions. Il faut que tu saches : vingt ans après que tu l’aies dit, je n’ai jamais réussi à te le dire.
Une nuit, alors que tu dormais, tu as parlé, tu me parlais
pour me dire : «C’est pas grave, ça pourrait m’arriver ; l’important, c’est que tu reviennes. « Je t’aime »
Dans le silence de la nuit, dans l’obscurité, j’étais bouleversé. Il faut que tu le saches.
Je t’avais choisie alors que nous n’avions pas l’âge de donner un âge à ce mot : « choisir ».
Je t’avais pris la main au bal du quatorze juillet, tu te souviens, pour la garder jusqu’à la fin.
T’aimais-je vraiment même si, à un certain moment, je t’écrivais tellement souvent ?
C’était le moment d’amant, le moment d’avant. Je n’avais pas encore compris qu’ «aimer» est un verbe transitif.
Tu m’as dit dans ton rêve « Je t’aime ». Te souviens-tu de ces journées du mois de mai, entre la séparation et le divorce où je t’ai embrassée comme jamais ?
Des baisers jamais oubliés.
Je crois, aujourd’hui, que , malgré ces années de vie de divorcés, c’est peut-être encore une réalité…oubliée, ignorée. Je le crois parce que je le perçois chez moi malgré notre passé.
Je le crois parce que je le perçois chez toi malgré ton hostilité. Je suis un homme heureux.
Et ça, crois moi, c’est la meilleure des clés.
Aujourd’hui, j’essaie de rencontrer celle que mon âme a choisie. Je peux te dire sans
arrière-pensée que je t’ai aimée. Et « Le premier amour est toujours le dernier ».
Aujourd’hui, je désire exprimer une demande, une pensée que j’aurais sans doute dû t’offrir après la nuit où tu as rêvé de m’aimer. Je te demande, je me demande de vraiment nous quitter pour vivre enfin un vrai mariage, en toute liberté, par la pensée, et réaliser chacun de notre côté notre histoire sans jamais nous heurter. La vie est ainsi faite que, parfois, elle est bien faite. Bien sûr, c’est de notre fait. Mais, en fait, en sommes-nous si sûre ?
La nuit, il n’y a pas que les êtres qui rêvent. Dans le ciel, les étoiles rêvent que sur une planète, la Terre, vivent ceux qui pensent à elles. Elles désirent être aimées.
Elles acceptent de l’être. C’est ce que nous n’avons pas su faire. Le temps est un allié qui nous aide à nous lier à nous-même et à l’être aimé.