Porche
Le monde guide mes pas. La foule me conduit sur les pas de tous ceux qui viennent de passer. Regarder sans voir. Entendre sans écouter. Une sonnerie, une réponse, une voix portée par les ondes, des mots qui relient le monde qui marche pas à pas sur le trottoir où mon pas continue d’avancer. La voix s’interrompt. C’est fini.
Mon regard tombe sur un homme qui ne marche pas, qui a arrêté ses pas, là, sous un porche qui regarde de haut ceux qui passent devant lui.
L'homme, lui, voit les pas d’en bas, les pas qui ne le voient pas.
Est-il protégé sous ce porche si bien taillé ? Ne serait-il pas heurté par le passage de tant de pieds ? passer sans s’arrêter. Ralentir le pas.
Mon regard est attiré par la beauté du porche et de l’homme, posé à son pied, courbé sous sa barbe mal taillée, figé sur son séant mal dessiné, habillé dans des habits fripés. Le voir sans le regarder.
A-t-il un regard ? N’aurait-il plus d’yeux ? Ralentir à peine pour ne pas le déranger, pour ne pas être heurté par ceux qui marchent déjà sur mes pas passés.
Comment parler à l’homme qui a arrêté de marcher ? Y saurait-il de la place pour deux sous ce porche si bien taillé ? S’il tendait la main, mon pas se serait avancé. En cette journée d’hiver glacé, ses mains sont cachées dans des poches mal taillées, son cou est engoncé dans un manteau rapiécé, son cou est entouré d’un cache-nez troué. A-t-il un cou ? A-t-il des pieds ? Que voit-il ? C’est fini
Le monde guide mes pas. La foule me conduit sur les pas de tous ceux qui viennent de passer.