Le Désir

 

 

Elle aime en elle le désir qu’elle anime en lui

 

Louise, je pars rencontrer ton âme. Serait-elle là, quelque part, toi qui « voit mourir tout chose animée, lors du corps l'âme sutile part ?» Te souviens-tu de Sève, de quelques années ton aînée ? Il avait choisi de mettre en veille une part du désir. Toi, tu liais à merveille ta part de plaisir : « Je suis le corps, toy la meilleur part ».

Chère Louise, te reconnaîtrai-je ? Je te cherche encore. Le désir me donne le plaisir d'ajouter un mot dans la boîte de Pandore, une façon de donner à Scève un bonheur de plus, une sorte de renaissance de la souffrance, en donnant corps à l'espérance, à sa bonté d'âme, posée au pied de sa dame. Louise, bien avant Georges, n'avais-tu pas l'envie de dire que ton seul désir était de demander de ne pas te « laisser si longtemps pamée ?» Le corps est-il un jeu ? Celui de ton

« libre arbitre » ? Zeus n'a qu'à bien se tenir quand tu cries « Rens lui sa part et moitié estimée ». Donner ton corps serait-il le prix de la beauté, beauté de donner de toute son âme ? Le désir, ne serait-il pas dans l'oubli, dans l’abandon, dans l'abandon même du désir ? Le corps s'unit au corps, l'âme s'unit à elle-même, une façon de se pénétrer. Dieu n'a rien de divin : il pénètre les cœurs pour imposer son désir, le désir de dire qu'il aimerait exister. Il appelle la Dame de toute son âme en la suppliant de croire en lui. Dis-lui de se calmer en donnant ton corps à satiété. La vie est ainsi. L’Un égale deux. À partir de deux, chacun peut devenir dieu. Le désir n'a qu'un temps, le temps de se consommer. De mes partenaires du moment, librement désirées, tu es, Louise, celle que je n'ai pas rencontrée.

 

D’après la sixième tapisserie de la Dame à la licorne

où est inscrit en français : « À mon seul désir »